« Décapiter ? Gloups… »
Un soldat se tourna vers le puits sans fond donnant sur un ténu filet de lumière.
« Vous avez entendu ? ô capitaine, mon capitaine, que pouvons-nous faire ? »
Point de réponse. Le soldat paniqua quelque peu.
« Euh… ô gardienne du château des muses, fée du cercle des mots dits, enchanteresse du balcon des étoiles,
A l’heure où la hache tournoie, où le tranchant pointe le bout du trait, telle la lune dans la nuit qui provoque les marées,
Laisse-moi te conter l’histoire de la pierre voyageuse, qui s’élance vers le bout du bout du monde, et tombe sur une ange, du moins sa malle !
Alors, alors… Il était une fois une pierre voyageuse qui s’élança vers le bout du bout du monde, mais tomba sur une malle portée ! Et voilà ! Tadam !
Euh… Non, attendez, pas la décapitation … Euh, ô capitaine, mon capitaine ?! »
Toujours pas de réponse, si ce n’est… Cette fois, le filet de lumière s’évapora, laissant place à une étrange brume phosphorescente qui remonta, remonta, sortit du puits et assombrit le paysage tout en lui donnant une touche de coucher de soleil tamisé.
La voix du soldat se fit entendre tel un écho, un peu plus modulée :
« Ô ! fleur de feu,
Il était une fois, dans un volcan sous-marin, l’ombre de créatures oubliées depuis la nuit des temps.
La lumière de leur être se cachait dans l’abysse des abysses.
Toutes s’en portaient bien ainsi, pouvant danser, nager, sans être inquiétées par les créatures d’en haut.
Un jour de plein été, à l’heure où les nuages grondent, où l’air est mitraillé des éclats de l’airain céleste, une gigantesque pierre issue de la nuit des temps sombra, s’engouffra en direction du volcan. Des poissons et des mammifères marins ne purent rien faire à son passage, d’autres eurent le temps de quitter le point d’impact.
Il était une fois, un volcan sous-marin à la crête ouverte.
La pierre fut arrêtée, ne fit pas de dégâts parmi les créatures du volcan sous-marin, leur château encore intact. Mais bientôt l’eau salée et l’eau de feu se rencontrèrent, suivit une réaction en chaîne, et les ombres devinrent vivantes, et les vivantes furent mises en danger par le chaos ambiant.
Des requins préhistoriques, nés dans la nuit de l’océan, sortirent à ce moment vers ce jour de flamme.
Il était une fois un jour de flamme dans une nuit de lumière.
Sans l’envoyée des anges du ciel, une sirène, cette histoire se serait arrêtée là, dans une fin sinistre pour les créatures sans défense face aux éléments déchaînés.
Il était une fois une envoyée des anges du ciel, une sirène munit du sceptre des 5 éléments.
Après avoir agité son sceptre, la sirène poussa un cri défiant tout bruit et tout silence. Une étrange lumière jaillit de sa bouche jusqu’à l’abysse des abysses, éloignant les requins, enrobant d’un voile protecteur chaque être des créatures oubliées afin qu’elles puissent regagner leur profondeur sans être plus blessées, séparant l’eau de feu et l’eau salée, dissolvant la pierre issue de la nuit des temps, y forgeant un nouveau dôme pour le volcan sous-marin. Aussitôt fait, l’envoyée regagna son poste de vigile de la Loi du Ciel.
Il était une fois plusieurs mondes sauvés. »
Ces derniers mots exprimés, la brume s’évapora, laissant un soldat perplexe, mais pas trop mécontent.
« Alors ?! A vous de décider du sort qui sera réservé ! »
Et c’est ainsi qu’un couperet tomba, à côté, jusqu’à une prochaine fois ?!
* * * * * * * Une belle nuit d’été, rien ne sortit de la bouche du capitaine. Le soldat paniqua quelque peu lorsqu’il vit l’instant fatidique approcher et la grande Shahryare s’impatienter. Il marcha à pas rapides sur les remparts, posant tour à tour ses yeux sur l’horizon obscur de l’océan silencieux et celui de vagues remuantes, et sur le couperet dans la cours.
Soudain, alors que ses paupières se faisaient lourdes, il eut une idée ! Il courut jusque dans une chambrée, sortit un parchemin et alla voir la gente dame au tranchant ferme.
Si vous me le permettez, ô insatiable Shahryare, insoumise parmi les insoumises, je ressors un texte de circonstance pour cette fin de nuit :
« Avant d’aller dormir ou mourir
Avant d’aller dormir ou mourir,
Rejoindre la lumière du dehors
Par les ombres du dedans,
J’aurais voulu vous dire,
J’aurais voulu conter stellaire flore,
J’aurais voulu dans l’élan,
Au creux des mots tamisés,
Les légendes d’aujourd’hui vous dévoiler…
Avant d’aller dormir ou mourir,
J’aurais voulu aller au bout de mes aventures
Mais la plume d’esprit a « tiqué »,
Les héros se sont mis à frémir,
Se sont faits à contre paupière le mur
Et mon cœur s’est mis à courser
Le sable du marchand en vue d’offrir
Une fin des temps aux faux mobiles…
Avant d’aller dormir ou mourir,
Rejoindre la pénombre qui oscille,
J’aurais voulu pouvoir la dire,
La beauté de vie en mots à partager,
La beauté de la farandole des parchemins liés,
Ceux qui ont été
A nos rivages semés…
Avant d’aller dormir ou mourir,
J’aurais voulu pouvoir composer,
En une courte envolée, en quelques vers,
L’histoire des montagnes saisir
Des abîmes, des cieux grisés,
Parler des maux de la terre,
Mais une muse a voulu savourer
Et sur la page ces lignes a « saigné »…
Pour l’indicible, repos n’est pas une trêve,
L’éveil en est la sève,
Les volets clos en sont la grève,
Alors je vous souhaite doux rêves…
Et maintenant, la tête reposée,
Je peux aller dormir ou mourir, même si la mutine
Continue, dans les recoins, lumière à pointer,
Murmurant ses mots, agitant en songe sa mine… »Le récitateur déglutit, espérant avoir échappé une nouvelle fois au couperet.
* * * * * * * Alors qu’il était dans la cours, à gambader sur les vagues impalpables, près du couperet, une fin de journée, au temps des falaises du crépuscule, le soldat fut interpellé par un capitaine : « Si vous êtes prêt, c’est à votre tour ! »
Le soldat fit un signe d’entendement et se leva, prit une grande inspiration et se rendit à pas rapides dans la salle des mille et une histoires. Il eut un mélange d’appréhension et de joie. Mais alors qu’il franchit le seuil, une lumière violette crépusculaire illumina son regard, et il s’arrêta un instant.
L’Insoumise Shahryare : « Eh bien ?! J’attends ! Que faites-vous donc planté là ? Si vous voulez directement aller au couperet, libre à vous ! »
Le soldat baissa les yeux : « Ô gente Shahryare, oreille attentive, croqueuse de contes, muse d’Athéna… »
L’Insoumise Shahryare : « Muse d’Athéna ? Vraiment ? »
Le soldat releva les yeux, avec un air légèrement contrit, puis laissa s’échapper un petit rire en haussant les épaules : « Oui, vraiment ! »
Il alla s’assoir sur le coussin du conteur, devant le trône.
Le conteur : « Ce soir, je vais vous raconter l’histoire du capitaine qui se prenait pour un soldat… Mais si ça ne vous plait pas, plutôt que de me faire couper la tête, j’opterai pour le déshonneur en m’enfuyant ! »
L’Insoumise Shahryare : « Oh oh ! Vous voilà bien optimiste ! Je suis peut-être réellement muse d’Athéna ? En tout cas, vous le découvrirez si jamais vous essayez de fuir ! »
Le conteur : « Vous voilà bien optimiste ! »
L’Insoumise Shahryare : « Impertinent ! »
Le conteur : « Pertinent ! Je cours vite et j’ai déjà mon plan, mais… »
L’Insoumise Shahryare : « Je pourrais demander à l’instant à ce que la porte de cette salle soit fermée et les fenêtres gardées ! »
Le conteur : « J’ai des complices ! »
L’Insoumise Shahryare : « Vous bluffez ! »
Le conteur : « Euh… Oui, bon, je ne sais pas vous mentir ! Toujours est-il que… Euh… ça semblait une bonne idée au départ, en fait… Bref ! De toutes les façons, je vous aime bien, et je n’ai pas l’intention de fuir ! Et puis même si mon histoire est courte, je pense qu’elle devrait m’éviter de passer l’arme sous terre ! »
L’Insoumise Shahryare : « Merci de m’en laisser juger ! »
Le conteur se lança : « Lors d’un nouveau jour naissant,
en fin d’hiver, au frimas,
un capitaine sorti,
prêt à braver tous les temps.
Il fut seul, sans ses soldats,
voulant mettre que sa vie
en jeu dans les coutumes
à exécuter toujours.
Quand à l’une il s’apprêtait,
sur la rive de l’écume
des étoiles du gel lourd,
il vit un vieillard tomber.
Touché par la vue de faux,
il tituba, s’arrêta,
à cet instant, des sorciers
du grand pays des cents flots,
élurent de planter mats,
de posséder les êtres
devant ses yeux immobiles.
Mais ils ne furent maîtres
qu’un battement qui cille,
un moment de faiblesse.
Pas assez pour l’emporter,
assez pour qu’aucun gagne,
tous vivent l’instant tristesse :
mages noirs dépossédés,
échappant de peu au bagne ;
capitaine sans mémoire,
se prenant pour un soldat. »L’Insoumise Shahryare : « Euh… Comment s’en est-il sorti ? Seul contre des mages ? C’est pas un peu abusé ?! »
Le conteur : « J’ai pas fini ! Enfin, j’ai pas abordé le comment, pour laisser votre imagination décider ! Voyez comme je suis généreux ! Mais dans mon histoire, il avait quelques pouvoirs, un capitaine des mages blancs ! et puis il a été aidé par d’autres, alertés par la bataille ! »
L’Insoumise Shahryare : « Hu hu ! Bon, soit ! Finissez ! »
Le conteur : « Depuis lors, les siens eurent beau
lui rafraichir, sans espoir
devant son manque de foi.
Il erra ainsi, servant
sans chercher à commander,
sans mettre non plus élan,
jusqu’à l’illumination
de sources à protéger,
vue de cieux en créations,
tels ceux d’une Shahryare
et de sa suite aux histoires. »L’Insoumise Shahryare : « Bon ! Vous pouvez disposer pour ce soir ! Allez me chercher le suivant ! »
Le conteur s’inclina, adressa un franc sourire à Shahryare et s’exécuta.
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