Les pages déchirées - roman à suivre
Par Pascal Lamachère le dimanche, mai 4 2008, 12:42 - Romans à suivre - Lien permanent
Chapitre 1 – Greendle et la plume chinée
« Un crin de lumière transperce
Dans sa course,
Une ombre se déchire,
Un trou dans le mur
Et l’impression d’infini au-delà… »
Tel est le chemin à venir d’un type, un homme baptisé Greendle. Il se considérait, s’était considéré ordinaire jusqu’à ce que…
« Le printemps danse
avec les nuages et le soleil,
dans les rues les fleurs s’ouvrent,
les étoiles s’y éparpillent… »
Un beau jour de mai, ces quelques mots chantés, accompagnés d’une musique classique diffusée par son radioréveil, le firent s’écumer vers le monde des yeux ouverts. Branché sur sa radio favorite, il enleva sa couette, s’étira, puis resta quelques instants allongé, repensant aux songeries de la nuit qui ne se s’étaient pas encore évaporées vers la dimension hors de portée des éveillés. Une fois fait, il se tourna vers le callepin posé sur la table de chevet, légèrement à cheval sur sa paire de lunette, non loin de l’appareil sonnore. Après un instant d’hésitation, il se leva, saisit le calepin de fortune (dans lequel était glissé en marque page un stylo) et se mit à scribouiller tout ce qu’il venait de passer en revu.
« la saison déraisonne,
l’homme raisonne,
des bouts de terre grognent… »
Greendle appuya sur le bouton off, fit trôner sur son nez légèrement aquilin la monture cuivrée de ses lunettes rondes, se diriga vers la petite salle de bain de son 23 mètres carré. Devant le miroir au dessus de l’évier, il plissa ses petits yeux, « contempla » son reflet de jeune homme de 28 ans. Ses cheveux bruns, bien qu’assez courts, avaient trouvé le moyen de se mettre en vrac. Il les ébouriffa, passa ensuite ses mains sur sa fine moustache, sa barbe naissante et en fin ses pommettes saillantes, avant de traîner son corps d’allure commune sous la douche.
« I hoope a day
loove will knock in my hearth
and the suun shine
and the suun… »
Ce jeune photographe-reporter se prit à chantonner, avec sa voix anglaise chaude et mélodieuse, de la soupe d’un boys band bien de chez lui. Bien qu’il avait eu le courage de s’expatrier en France, à Toulouse, Greendle se définissait lui-même comme un baroudeur pantouflard et aimait bien avoir ses repères lui rappelant sa terre d’origine, aussi peu à son goût soient-ils. Ceci dit, cette chanson traduisait plus un manque. Célibataire presque endurci, il avait gâché toutes ses potentielles relations depuis sept bonnes années, fait fuir toutes les femmes qui s’intéressaient à lui. Il en regrettait un certain nombre, parfois une plus que les autres, mais au fil du temps les regrets changeaient de tête, ce qui en soit, se raisonnait-il, était la preuve qu’il n’y avait paradoxalement rien à regretter. Toujours est-il qu’il avait l’élan pour compenser, en apparence, ce vide : il menait de front deux jobs, enfin, plutôt deux postes, l’un de correspondant photographe-reporter pour un journal anglais, l’autre de photographe reporter pour un local. Son temps libre en était devenu peau de chagrin. Toutefois, il se débrouillait pour grappiller, lier les activités, et ne se plaignait pas de son sort. Ainsi, aujourd’hui, samedi, il avait décidé de faire son « shopping » en se rendant sur son lieu de reportage…
Douché, coiffé, « déodorisé », habillé, le sac - préparé la veille - en bandoulière sur l’épaule gauche, Greendle était paré. Plus par habitude, par acquis de conscience quasi obsessionnelle que par nécessité, il vérifia sur son agenda virtuel le programme de la journée. Il n’y avait rien de bien différent des autres jours, il savait déjà où il devait aller, ce qu’il voulait faire avant. Il rangea son agenda, éteignit la lumière et sortit…
« L’ombre diaphane
des promesses de la nuit
s’évanouit
au creux de la volonté
trop acérée… »
Dans la fraîcheur matinale de la ville, non loin du Grand Rond, il regarda sa montre à aiguilles qui indiquait 6 h 45. Il avait le temps de prendre son breakfast dans un bar et de flâner sur le marché aux puces et à la brocante de la Place Saint Sernin. Sur le chemin, il se choisit donc une petite table, près d’un coin de verdure, en plein un hot-spot wifi gratuit. Il passa commande et posa devant lui son petit ordinateur portable pour checker ses messages.
Celui d’une amie-du-net japonaise fit à ses lèvres former un large sourire. Expatriée sur une île, qu’elle lui avait dit, ne précisant ni le nom ni « l’emplacement géographique approximatif », ses envolées fleuraient bon la lumière et la chaleur équatoriales. Il avait entamé des échanges épistolaires avec elle par l’entremise d’un site de poésie shakespearienne. Après que le serveur a déposé son thé, son jus de pamplemousse, son croissant et son oeuf au plat, après un « mirci » et l’entame des mets, il rédigea sa réponse :
« Cher Liloo,
J’ai lu avec grand plaisir ce que tu m’as envoyé, voici un petit écho pseudo poétique en guise de claviardage impressionnatif :
Le paysage de tes mots m’émeuvent,
je les imagine murmurer aux vagues
la beauté de la terre qu’elles ne peuvent toucher,
qu’elles admirent au travers de leur écume,
je les imagine porter par elles et venir toucher d’autres rives
comme une bouteille à la mer traversant l’océan
et échouée avec amour,
transformant le rocailleux
en une myriade de sable fin…
@micalement,
Greegree »
Greendle cliqua sur « envoyer » puis engloutit ce qui restait, rangea son petit ordinateur et prit congé…
Dans sa course,
Une ombre se déchire,
Un trou dans le mur
Et l’impression d’infini au-delà… »
Tel est le chemin à venir d’un type, un homme baptisé Greendle. Il se considérait, s’était considéré ordinaire jusqu’à ce que…
« Le printemps danse
avec les nuages et le soleil,
dans les rues les fleurs s’ouvrent,
les étoiles s’y éparpillent… »
Un beau jour de mai, ces quelques mots chantés, accompagnés d’une musique classique diffusée par son radioréveil, le firent s’écumer vers le monde des yeux ouverts. Branché sur sa radio favorite, il enleva sa couette, s’étira, puis resta quelques instants allongé, repensant aux songeries de la nuit qui ne se s’étaient pas encore évaporées vers la dimension hors de portée des éveillés. Une fois fait, il se tourna vers le callepin posé sur la table de chevet, légèrement à cheval sur sa paire de lunette, non loin de l’appareil sonnore. Après un instant d’hésitation, il se leva, saisit le calepin de fortune (dans lequel était glissé en marque page un stylo) et se mit à scribouiller tout ce qu’il venait de passer en revu.
« la saison déraisonne,
l’homme raisonne,
des bouts de terre grognent… »
Greendle appuya sur le bouton off, fit trôner sur son nez légèrement aquilin la monture cuivrée de ses lunettes rondes, se diriga vers la petite salle de bain de son 23 mètres carré. Devant le miroir au dessus de l’évier, il plissa ses petits yeux, « contempla » son reflet de jeune homme de 28 ans. Ses cheveux bruns, bien qu’assez courts, avaient trouvé le moyen de se mettre en vrac. Il les ébouriffa, passa ensuite ses mains sur sa fine moustache, sa barbe naissante et en fin ses pommettes saillantes, avant de traîner son corps d’allure commune sous la douche.
« I hoope a day
loove will knock in my hearth
and the suun shine
and the suun… »
Ce jeune photographe-reporter se prit à chantonner, avec sa voix anglaise chaude et mélodieuse, de la soupe d’un boys band bien de chez lui. Bien qu’il avait eu le courage de s’expatrier en France, à Toulouse, Greendle se définissait lui-même comme un baroudeur pantouflard et aimait bien avoir ses repères lui rappelant sa terre d’origine, aussi peu à son goût soient-ils. Ceci dit, cette chanson traduisait plus un manque. Célibataire presque endurci, il avait gâché toutes ses potentielles relations depuis sept bonnes années, fait fuir toutes les femmes qui s’intéressaient à lui. Il en regrettait un certain nombre, parfois une plus que les autres, mais au fil du temps les regrets changeaient de tête, ce qui en soit, se raisonnait-il, était la preuve qu’il n’y avait paradoxalement rien à regretter. Toujours est-il qu’il avait l’élan pour compenser, en apparence, ce vide : il menait de front deux jobs, enfin, plutôt deux postes, l’un de correspondant photographe-reporter pour un journal anglais, l’autre de photographe reporter pour un local. Son temps libre en était devenu peau de chagrin. Toutefois, il se débrouillait pour grappiller, lier les activités, et ne se plaignait pas de son sort. Ainsi, aujourd’hui, samedi, il avait décidé de faire son « shopping » en se rendant sur son lieu de reportage…
Douché, coiffé, « déodorisé », habillé, le sac - préparé la veille - en bandoulière sur l’épaule gauche, Greendle était paré. Plus par habitude, par acquis de conscience quasi obsessionnelle que par nécessité, il vérifia sur son agenda virtuel le programme de la journée. Il n’y avait rien de bien différent des autres jours, il savait déjà où il devait aller, ce qu’il voulait faire avant. Il rangea son agenda, éteignit la lumière et sortit…
« L’ombre diaphane
des promesses de la nuit
s’évanouit
au creux de la volonté
trop acérée… »
Dans la fraîcheur matinale de la ville, non loin du Grand Rond, il regarda sa montre à aiguilles qui indiquait 6 h 45. Il avait le temps de prendre son breakfast dans un bar et de flâner sur le marché aux puces et à la brocante de la Place Saint Sernin. Sur le chemin, il se choisit donc une petite table, près d’un coin de verdure, en plein un hot-spot wifi gratuit. Il passa commande et posa devant lui son petit ordinateur portable pour checker ses messages.
Celui d’une amie-du-net japonaise fit à ses lèvres former un large sourire. Expatriée sur une île, qu’elle lui avait dit, ne précisant ni le nom ni « l’emplacement géographique approximatif », ses envolées fleuraient bon la lumière et la chaleur équatoriales. Il avait entamé des échanges épistolaires avec elle par l’entremise d’un site de poésie shakespearienne. Après que le serveur a déposé son thé, son jus de pamplemousse, son croissant et son oeuf au plat, après un « mirci » et l’entame des mets, il rédigea sa réponse :
« Cher Liloo,
J’ai lu avec grand plaisir ce que tu m’as envoyé, voici un petit écho pseudo poétique en guise de claviardage impressionnatif :
Le paysage de tes mots m’émeuvent,
je les imagine murmurer aux vagues
la beauté de la terre qu’elles ne peuvent toucher,
qu’elles admirent au travers de leur écume,
je les imagine porter par elles et venir toucher d’autres rives
comme une bouteille à la mer traversant l’océan
et échouée avec amour,
transformant le rocailleux
en une myriade de sable fin…
@micalement,
Greegree »
Greendle cliqua sur « envoyer » puis engloutit ce qui restait, rangea son petit ordinateur et prit congé…
Commentaires
j'ai trouve cette histoir troublante et superbe ,merci a vous pour nous faire lire de si belles écritures
bisous
sionie
Merci ça motive